Depuis de nombreuses années les chiffres du chômage sont « organisés » pour minorer le poids de cette réalité : une part significative de la population active ne travaille pas, et ce durablement. Certes, la « crise » a accentué cette situation, mais ce terme là n’est-il pas devenu désuet et sans signification véritable ? Depuis 30 ans les gouvernements successifs n’ont de cesse de prévoir une croissance créatrice d’emplois (2,5%), alors que la moyenne de celle-ci est invariablement bloquée à 1,6. Si nous vivons dans la « crise » depuis trois décennies ne faut-il pas en tirer la conclusion que notre modèle de développement économique et social a vécu ? Qu’il ne correspond plus à nos attentes et nos besoins ? Poser la question et remettre en cause l’existant est difficile car nous ne disposons pas d’un modèle de rechange. Or le changement n’est jamais aussi effrayant que lorsqu’il est incertain.
Etat et grands groupes, les deux piliers menacent de s’effondrer
Longtemps les besoins d’emplois ont été pourvus par les grandes entreprises et les pouvoirs publics. Ainsi, en pleine période de décentralisation (1985-2005) l’Etat augmentait encore son nombre de salariés de 200 000. Notre endettement public colossal nous interdit d’avoir recours à cet outil dans les prochaines années.
Les grandes entreprises, par effet de mondialisation et tant que l’énergie sera aussi peu coûteuse, resteront dans une logique de réduction d’effectifs. Elles créeront certainement des emplois, mais pas ici.
Les multiples petits piliers du nouveau modèle
Notre capacité à créer des emplois dépend donc totalement des TPE-PME, des acteurs de ce que nous appelons « l’économie sociale et solidaire » sans qu’objectivement nos concitoyens sachent bien ce que cela signifie, et des particuliers (notamment les seniors).
Changer de modèle c’est s’appuyer de façon préférentielle sur ces acteurs économiques. Réformes fiscales, réorganisation du coût du travail, formation continue et organisation des carrières professionnelles, clauses préférentielles dans les marchés publics, accès au crédit, innovations technologiques, etc. sont autant d’outils qu’il faudra inventer. Et d’autres que nous n’imaginons pas ici.
Surtout, il s’agit d’ouvrir les yeux sur les réalités tabous de notre société ; en particulier le niveau de formation insuffisant de notre population active. Les commentateurs s’enorgueillissent souvent du meilleur taux de productivité des salariés français. Ce chiffre masque mal la réalité de ceux qui ne travaillent pas. Incroyable taux de chômage des jeunes (25% des ceux en âge de travailler) seulement concurrencé par celui des plus de 50 ans, qui éclaire un gâchis colossal des ressources humaines dans notre pays. Nous ne pouvons imaginer changer de modèle économique et social sans remédier aux 160 000 jeunes qui sortent chaque année de l’école sans qualifications, sans libérer de cette contrainte le million et demi d’illettrés parmi les actifs, sans réorganiser enfin la formation continue, pompe à finances totalement inefficace.
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